Persévérer dans l’espérance
Pentecôte 2011
Si la fidélité est une vertu essentielle à toute relation interpersonnelle, la persévérance est la vertu spécifique du temps : elles nous interpellent sur notre relation à l’autre
Lettre aux amis no. 52
Pentecôte 2011
Chers amis et hôtes,
Ceux d’entre vous qui nous fréquentent avec davantage d’assiduité ou qui suivent les interventions du prieur dans les journaux et les périodiques auront remarqué notre préoccupation croissante pour la situation ecclésiale, en Italie, mais non seulement. Nous constatons un climat de fatigue, d’abattement, qui a été défini par une expression extrêmement efficace : « L’air manque ». Ce qui, il y a déjà plusieurs années, avait été défini comme un « schisme englouti » a pris les traits d’un silence douloureux, d’une prise de distance, faisant réfléchir sur la grisaille qui, comme une brume automnale, semble tout envelopper et tout imprégner. Parmi nous aussi, les plus anciens, qui ont connu l’élan du printemps conciliaire, voient s’offusquer toujours davantage les espoirs qui étaient nés alors de la foi ferme et de l’audace prophétique non de personnes individuelles mais de la plus haute autorité magistérielle catholique : un concile œcuménique cum Petro et sub Petro. Les plus jeunes pâtissent de ce climat marqué dont l’horizon semble fermé et avec lequel doit quotidiennement se confronter leur génération, à laquelle est niée la crédibilité même d’un possible avenir meilleur. Oui, dire que « l’air manque » ne signifie pas uniquement ressentir l’essoufflement de poumons fatigués ou non alimentés d’air frais, mais veut dire aussi constater que notre respiration de croyants, l’Esprit du Seigneur ressuscité, trouve des obstacles pour ouvrir l’esprit et le cœur à sa volonté de paix et de vie en plénitude.
Nous assistons à la voix toujours plus étouffée de ce qui, dans l’Église, ne devrait pas s’appeler l’« opinion publique », mais bien plutôt sensus fidelium : la sensibilité, la perception de la foi et de ses implications, que chaque baptisé est habilité par l’Esprit saint à exercer et à alimenter à travers la confrontation avec ses frères et ses sœurs dans la foi, à travers la correction fraternelle, l’écoute réciproque, l’édification commune de cet édifice spirituel dont nous sommes appelés à être des « pierres vivantes » (1P 2,5). Aujourd’hui, dans la torpeur dominante, nombreux sont même les guides de la communauté chrétienne qui semblent incapables d’une parole convaincue, décidée, obéissante au « oui oui, non non » évangélique (voir Mt 5,37), une parole en mesure de faire résonner avec vigueur dans l’aujourd’hui de l’histoire les exigences chrétiennes absolues. Lorsque même la voix d’un pasteur se lève avec parrhésie, elle retombe sans faire d’écho, car le paradoxal mélange de mutisme et de vacarme, uni à l’accoutumance au mensonge, la suffoquent à sa naissance ou la relèguent dans le domaine des bonnes intentions d’un personnage « singulier ».